Bivouac spéléo au Bufo Fret
Deux jours sous terre dans le réseau du Bufo Fret
Une expédition qui se prépare
Revenons à la racine de la chose ; qu'est-ce qu'une expédition ? D'après le Larousse, une expédition c'est entre autre ; "Voyage scientifique dans un pays éloigné ou difficile, ou voyage touristique plus ou moins important ou mouvementé ; hommes et matériel participant à ce voyage : Expédition au pôle Sud." Certes, nous ne sommes pas partis au pôle sud mais pour ce qui est de la partie mouvementée pourquoi pas. Bivouaquer dans le réseau du Bufo Fret, ce n'est pas rien. Olivier était le premier motivé par l'aventure, il a embarqué avec lui son fils Baptiste et Benoît un ami. Sandrine est venue se greffer également pour participer au projet. A la dernière minute, Morgan a vu passer l'évènement sur les réseaux sociaux et sans hésiter une seconde est venu compléter l'équipe. On avait notre équipe motivée, il nous restait à assurer la logistique. Il a fallu rassembler le matériel nécessaire ; combinaisons, harnais, casques, lumières, duvets... Et aussi la nourriture pour deux jours sous terre. J'étais en charge de préparer à manger pour le groupe et d'assurer la couverture médiatique de l'évènement, appareil photo au poing. Rod est parti plusieurs fois en reconnaissance sur le terrain, il a repéré les endroits clés et l'emplacement du bivouac. On s'est donnés rendez-vous à Bugarach le samedi matin, 10h.
Ensemble, on s'est occupés de conditionner les affaires. Les duvets, les fringues de rechange, la nourriture, les cordes et trousse de secours. C'est compliqué de conditionner les sacs pour une expédition comme celle là. Il ne faut rien oublier mais il faut le minimum, car les sacs en spéléo demandent une attention et une gestion particulière. Les sacs, il faut les emmener, et ce n'est pas une mince affaire à travers les entrailles de la Terre. Rod nous expliquait la gestion des sacs, sorte de troisième bras pour le spéléologue. On a réussi à avoir un nombre de sacs acceptable, avec tout ce qu'il nous fallait dedans. On s'est mis en route pour l'entrée du réseau du Bufo Fret.
Premier jour sous terre
Une courte marche d'approche nous a mis dans le bain direct, l'entrée de la grotte était là. Tête la première on se jette dans l'inconnu. Au début l'excitation et le management des sacs dominent l'activité. On arrive dans "le lac des lutins", on barbote dans l'eau, la roche nous donne quelques avants-goûts de ce que la nature sous terre peut nous offrir mais pas de lutin. On mange un morceau près du lac. C'est le moment de la première remontée sur corde. Et oui, l'originalité de ce réseau est de remonter dans la montagne.
Monter sur corde c'est une chose, notre équipe a été bien briffée par Rod, on s'économise, il n'y a aucune performance à suivre, il faut maîtriser la technique afin de remonter sans se cramer complet au début de l'exploration du réseau. Mais monter les sacs c'est encore une autre paire de manche. Un équipier monte, il est suivi d'un sac au bout d'une corde monté à la poulie. Ce passage fini, on attaque la section dites de "Pearl Harbor". Un peu plus technique, il faut se faufiler dans un passage plus étroit en se faisant passer les sacs. Une belle action ! L'esprit d'équipe est au beau fixe, on rigole, on transpire, les sacs passent d'une main à une autre, on monte dans le réseau et on arrive au "Grand Balcon". A partir de là, vacances ! Les sacs sont montés dans la "Galerie des Sables", lieu de notre bivouac et nous pouvons repartir explorer le réseau.
Une petite montée sur corde encore et nous entrons dans la "Galerie des piques". L'ambiance est superbe, nous sommes sept explorateurs sous terre, des concrétions partout s'agencent comme des représentations théâtrales de mère nature, à chaque pas on découvre de nouvelles formes. C'est assez grand et pour se repérer Rod a emmené avec lui sa tablette et une version PDF de la topographie du réseau qu'on peut agrandir à 400%. C'est beau la technologie !
On découvre amusés les noms donnés aux différentes parties du réseau, pas toujours drôle comme "la peste brune" ou plus enjoué ; "le réseau boubou". Pour l'instant il semblerait qu'on soit dans la "Galerie des intraterrestres". On continue d'avancer, on passe de salles assez vastes à des sections plus étroites, on fait attention où l'on met les pieds. Des fois de grandes failles creusent le sol et on n'en voit pas le fond. C'est l'aventure !
Dans la "Galerie des petits gris", on arrive au grand toboggan d'argile. Avant d'y aller Rod nous annonce qu'il n'a pas été plus loin dans ses explorations précédentes de la cavité. Il est, comme nous, face à l'inconnu et donc face à la découverte. Remonter un toboggan d'argile n'est pas la meilleure idée que tu aies jamais eu. Rod trouve un passage, on se faufile, on arrive face à un laminoir, passage qui peut être large mais bas de plafond, on y est obligés de se déplacer en rampant. On sort de là au-dessus du toboggan, pari réussi ! On continue, grisés par la découverte et l'inconnu.
Se repérant avec la tablette, on arrive à savoir qu'on fait ce grand virage à 360°, pour l'instant ça va, tout le monde a le sourire, tout le monde veut continuer. Mais au bout de quelques instants on se trouve face à une crevasse où l'on avance en opposition, avec un peu de gaz sous les pattes et il semble que devant on ne puisse plus aller bien loin sans s'exposer dangereusement. Rod prend la décision de faire demi-tour, nous expliquant que c'est le lot des spéléologues de devoir renoncer sans avoir vu le fond. Il est rare de voir le fond. On fait donc le chemin inverse, on remonte ou descend des cordes, on arrive au bivouac. La notion du temps a complètement disparue dans notre équipe.
Au bivouac, il est question d'installer un endroit repéré avant par Rod pour le coin pipi, d'enlever les combis pour se mettre des habits secs, de préparer le repas. Sur une bâche on étend une belle nappe, on dispose les vivres. Le saucisson, la saucisse de foie, les anchois marinés à la provençale, quelques radis, des tomates cerises, des olives, un fromage de chèvre et un toudeille vache-brebis, la soupe de poireaux pommes de terre, recette de ma grand-mère, chauffe sur un réchaud. On mange de bon appétit, tout le monde a le sourire mais la fatigue est présente. On a crapahuté huit heures dans le réseau et quand la soupe arrive elle est appréciée par tous. Un petit verre de Gaillac pour remettre les plus vaillants sur pied, on se marre autour de la table, on se remet d'une belle journée en exploration. On installe le bivouac, une tente collective est amarrée au milieu de la belle "galerie des sables", tous nos explorateurs s'y installent sauf Baptiste décidé à affronter seul la nuit sous terre mais quand même juste à côté des autres.
Deuxième jour sous terre
La nuit fut marquée de sporadiques ronflements non identifiés, l'ours des cavernes peut être ? On ne s'est pas réveillé tôt, on a pris le café et un petit déjeuner, puis on a rangé le campement, reconditionner tout dans les sacs devenus plus légers. Le but est de ne laisser aucune trace de notre passage afin de ne pas déranger le monde souterrain. Avant de repartir de la "Galerie des sables", on va pousser un peu dans cette galerie, voir ce qu'il y a plus loin.
On passe dans un laminoir et on arrive dans une belle petite salle où la roche prend des formes insoupçonnables. Plus loin le laminoir est trop étroit pour qu'on puisse s'aventurer dedans. On fait demi-tour et on revient à notre bivouac. L'exercice de reconditionnement effectué, on peut descendre les sacs au carrefour entre le chemin du retour et les cordes pour monter jusqu'à la "Galerie des piques" d'où on pousse jusqu'à la "Galerie blanche".
Ce qui est superbe dans le réseau du Bufo Fret, c'est que chaque galerie possède un style bien particulier, le paysage n'est jamais le même et on découvre sans arrêt les différents paysages cavernicoles. La galerie blanche, quasiment inconnue pour Rod, est assez resserrée, accidentée, de belles concrétions finement ciselées s'étendent dans la roche, l'ambiance y est plus électrique. On monte, on passe en opposition quelques endroits et puis on se retrouve au puits.
Difficile d'avancer plus, on fait demi-tour. Nous retrouvons les sacs et l'emplacement est idéal pour un pique nique du midi. Il ne nous reste plus qu'à retraverser "Pearl Harbor" dont le souvenir restait vivace chez nous. Étrangement la descente s'est faites très rapidement et sans grandes difficultés. On a retrouvé le lac après avoir descendu en rappel ce que la veille on montait au bloqueur. On a retrouvé la sortie sous un grand soleil, sous les sacs la plage et on est redescendus à la voiture pour se changer, ranger le matos, boire une bière et échanger avec le sourire sur cette sortie.
Une expédition comme celle-ci ne laisse pas indifférent. La notion du temps s'échappe, les téléphones n'existent plus, le lien avec l'extérieur est complètement coupé, on est dans un monde hostile et étranger, loin de la maison. On fait face à soi même, ses peurs et ses envies mais on est bien entourés. C'est une belle expérience et un intense morceau de vie. Avec la bonne équipe, c'est un plaisir partagé ! Si vous aimez l'aventure et la découverte, n'hésitez pas à vous renseigner sur nos prochaines expéditions en bivouac !